La géographie, disait Yves Lacoste, pape de la discipline, sert d'abord à faire la guerre. Jacques Lévy, géographe d'aujourd'hui, sort un gros canon pour «réinventer la France», la découvrir telle qu'elle est, c'est-à-dire urbaine et bien loin de tous les mythes de ruralité qui encombrent l'organisation de son espace. Armé de munitions de fort calibre, Lévy dézingue tous les dogmes. A commencer par celui de «l'uniformité» , appliquée pareil partout par un Etat se voulant impartial, et qui «se fonde sur un triple déni de ce qu'on apprend de la géographie des sociétés contemporaines : l'espace est différencié ; cette différenciation est utile ; inégalités et différences ne sont pas synonymes».
Ce fantasme de l'uniformité n'a qu'un but : minorer la ville. On apprend ainsi que l'Insee a «rectifié son zonage de 1990 […] trop "généreux" envers le monde urbain». Hop, 8 millions d'habitants reversés dans les campagnes, indépendamment de la réalité de leur mode de vie. Un refus «de la France telle qu'elle est» au profit d'une image «telle que le Sénat voudrait qu'elle fût». Mêmes inepties ruralisantes dans l'aménagement du territoire à la française, incarné par la Datar à laquelle, bon signe, «le gouvernement attache de moins en moins d'importance [et de moyens]», note Lévy. Qui déboulonne aussi le cliché d'un Paris siphonnant le pays. C'est l'inverse.
Globalement, écrit-il, «ce qui manque le plus en France du