Samedi
Sculpter la vie
Turquie orientale. J'aime ce mot d'«Orient» même si, depuis Edward Saïd et son magistral Orientalisme de 1978, il est tombé un peu en désuétude. Un livre qui m'avait ennuyé à la première lecture - trop nourri de ressentiment personnel je pensais - mais qui, avec le temps, infusa l'idée d'un rééquilibrage culturel nécessaire entre Occident et Orient(s). Nous sommes tous à l'Orient de quelque part… Et j'avais aimé les Mémoires de cet homme fragile. Avec les années, on voit que ce n'est plus de rééquilibrage dont il s'agit - le temps de Saïd est hélas terminé - mais de construction intellectuelle tout simplement, tant les défis d'avenir sont nombreux pour les universités du Proche et Moyen-Orient. Le postcolonialisme est bien terminé. A Reyhanli donc, dans l'ancien Sandjak d'Alexandrette, où je me trouvais l'été dernier sous une canicule d'enfer à interviewer des réfugiés syriens. Parmi eux, je me souviens de ce jeune sculpteur arrivé d'Alep à qui la municipalité turque avait offert des outils pour qu'il puisse poursuivre son œuvre : un monument dédié à la paix entre communautés et religions. Je pense à lui en ce jour d'attentat où cinquante nouvelles victimes sont brûlées sur l'autel des passions. Le Premier ministre turc parle de «merde syrienne». C'est élégant. Qu'est devenu ce jeune artiste ?
Dimanche
Confins d’Europe
Je me trouve en Bulgarie pour rencontrer le roi Siméon. A Sofia, c'est jour d'élection pour ce petit pays d'Europe «orientale». J'accompagne pour voter celui