Menu
Libération

Fais court et meurs

Article réservé aux abonnés
publié le 19 juin 2013 à 19h06

Notre époque si vive et si fraîche a transformé la communication en art de l'interpellation. Les pénibles discours d'antan ont laissé place à des messages brefs et joyeux. Ce sont des tag lines («Elle est bègue, il est sourd, ils vont s'aimer passionnément») vantant des films que nous n'irons pas voir. Ce sont des tweets («@Victor L'ombre est noire toujours is.gd/4ahaY6 #sunrise») renvoyant vers des pages web que nous ne consulterons pas. Ce sont des avertissements («Fumer tue») dont nous nous tapons éperdument. Tôt ou tard, le livre devait être concerné à son tour par cette radicale condensation de la pensée.

Il suffit de fréquenter un peu le métro parisien pour constater que des bouquins censés avoir un bel avenir commercial bénéficient, comme les films, d'affichages publicitaires articulés sur de percutantes tag lines. «Il arrive toujours un moment où il faut faire l'état des lieux», claironne ainsi une pub pour l'édition poche des Lisières d'Olivier Adam. En lettres noires et rouges, au-dessus d'une photo de l'auteur affichant un regard concerné, ce message vient clignoter à la périphérie du champ de vision de l'usager du métro pour lui signaler l'existence quelque part (sans doute en librairie) d'un texte sur les vicissitudes de la vie.

Deux options s'offrent alors au passant. La première est de purement et simplement ignorer le message : ce n'est pas la plus originale. La seconde est de développer la tag