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Libération
Critique

Alarmes secrètes

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Une romancière sud-africaine affronte son biographe dans «Absolution»
publié le 28 août 2013 à 19h06

Les romans contemporains du monde entier regorgent de personnages d'écrivains, ç'en est lassant. Il suffit pourtant d'une scène à Patrick Flanery, une seule, pour que nous adoptions Clare Wald, la romancière sud-africaine blanche et célèbre qu'il invente dans Absolution. Elle vit au Cap dans une maison ultrasécurisée. Le narrateur, Sam, vient se présenter, et l'interroger. Il est son biographe très officiel, elle l'accueille sans le tolérer, ou l'inverse, le maltraite d'une patte indolente qui pourrait l'abattre d'un coup. Elle est gigantesque (parmi les nonagénaires, format Doris Lessing plus que Nadine Gordimer), s'adoucit, se conforme à son nom, Wald, qui veut dire forêt : «Hors de la forêt émerge la personne que j'ai créée dans ma tête : mi-ogre, mi-mère, refusant et donnant, mauvais sein et bon sein, entourée de bois ou de bosquets.»

Sœur. Nous savons dès la première page qu'ils se sont déjà rencontrés. Les circonstances se mettront en place selon la logique d'un lent et passionnant labyrinthe. C'est suffisamment grave pour que Clare Wald, dans une de ses lettres imaginaires à sa fille disparue, avoue : «Et le trouver soudain face à moi, c'était comme d'être confrontée à mon assassin.» Clare Wald a pas mal de choses à se reprocher, comme tout le monde et un peu plus, compte tenu du régime politique. Elle a appartenu aux commissions de censure gouvernementale (mais n'a censuré qu'un seul livre, et encore, c'