Romans
L'art est difficile, la critique ne l'est pas moins. Arnaud Viviant exerce et a exercé, entre autres à Libération, ce travail incertain, souvent méprisé, ne tenant qu'à l'état d'une passion corrompue par le simple fait d'en vivre : «La lecture : moins un vice impuni, suivant la vieille formule, qu'un vice aujourd'hui passible de mort lente. Il tournait les pages, et se tournait les pouces à en crever.» Parlant de lui comme si c'était un autre, Viviant écrit à la fois une autobiographie fantasmée et une chronique de son existence quotidienne de lecteur, ou plutôt de fan d'écrivains, de la manière dont ses fantasmes littéraires l'ont formé et forment ses journées : «Puisant jour après jour dans le couloir de la mort, piochant au pifomètre dans la pile branlante des livres qui hurlaient pis que pendre leur nouveauté criarde […], tandis qu'autour de lui la nuit critique s'approfondissait.» Sur ce chemin triste et astringent, il évoque les écrivains qu'il aime (Sartre, Ellroy, Debord, ceux du Nouveau Roman), ceux qu'il n'aime pas (Onfray). Apparaît une géographie intime de Paris, ville où il se cogne sans cesse aux fantômes de ses héros littéraires, vivants ou morts, et dont il ne sort pas plus qu'un papillon d'une lampe : si leur mythologie l'étouffe, leurs livres l'aèrent peu. Ce sont les personnages gazeux d'une comédie humaine qui ne peut être ni tout à fait écrite, ni tout à fait vécue. Ph.L.
«Nous étions une famille de deux enfants, plus les pa