Il suffit de pas grand-chose : juste fermer les yeux quelques instants et tenter d'imaginer un… trou sans bords. Echec garanti. A éloigner à l'infini les bords, à ne plus les «voir», l'esprit se perd dans le néant, où il ne décèle aucun «trou», et à les percevoir encore, il demeure «aux abords», dans ce qui n'est pas tout à fait le trou, hors du trou donc. Resterait-on aussi penaud si on s'avisait de penser le «trou» de mémoire ? Probablement, on ne trouverait aucun autre «objet» que la mémoire, que les processus de mémorisation, avec leurs ralentissements, leurs défaillances, leurs ratés - de la même façon qu'ouvrant le capot d'une voiture qui s'est inopinément arrêtée, on ne peut observer une «panne», mais seulement un moteur et ses pièces déficientes.
Qu’est-ce alors que l’oubli ? On le dirait d’abord semblable à la goutte de mercure qu’on n’arrive pas à saisir. Il énerve, parce qu’il vient quand il veut, brise le fil des pensées, déconcerte, affole, embarrasse. Plus «gros», plus systématique, il apparaît comme un casse-tête, l’énigme du psychisme, qu’il fore de toutes parts et vide de certains de ses contenus, ou la confrontation la plus réaliste avec la disparition, la mort. Un monstre invisible, un diable, un dieu, capable de faire aux hommes autant de mal que de bien, de les sauver comme de les perdre. Ou un bon génie, qui décharge l’âme du faix des horreurs vécues, de la culpabilité, des remords.
Condensation. En dépit de