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portrait

Philippe Rahmy. En verre et contre tout

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Le cahier Livres de Libédossier
La rentrée des pages (11/12) Ce Genevois, qui livre là sa Chine, est atteint de la maladie des os de verre, qu’il contourne par les mots.
publié le 30 août 2013 à 19h06

On aimerait commencer par le livre. Par cette langue compacte et précise, ces phrases qui s'enroulent autour de Shanghai et rapportent dans leurs filets des ouvriers «qui saucent leur gamelle avec du papier journal», des moustiques «qui auréolent les poussettes et les poubelles». Des rues pleines de cris et de chocs, et cette gastronomie d'os et d'arêtes, qui garde en elle «un fond de punition : on mange des barbelés».

Mais alors, quand parler de la maladie ? Si Philippe Rahmy écrit bien, Philippe Rahmy est aussi atteint de la maladie des os de verre. Il est né en mille morceaux, a grandi un casque sur la tête, perclus au fond de son lit. Son état est mentionné à la première ligne de sa biographie, malgré le conseil d'un ami auteur de gommer la maladie, de ne pas devenir l'handicapé-qui-écrit. Mais un écrivain ne peut partir que de lui-même. Ses trois livres tournent en orbite autour de son mal. Le premier, Mouvement par la fin (2005), était une apnée au cœur de la douleur. On y lit des phrases comme : «Réconfort de savoir que je souffrirai jusqu'à la fin», qui lui ont valu d'être comparé à Fritz Zorn. Après, la voie était plus dégagée.

En cette rentrée, Philippe Rahmy revient avec un Béton armé d'une autre ampleur, aussi ouvert et fourmillant que le premier était replié sur lui-même. Récit du voyage qu'il fit à l'invitation de l'Association des écrivains de Shanghai, le livre mêle la fraîcheur des premières fois à sa longu