De très nombreux témoignages ont été publiés sur la machine d'extermination industrielle d'Auschwitz-Birkenau, dont des œuvres majeures comme Si c'est un homme de Primo Levi ou le plus méconnu C'est en hiver que les jours rallongent de Joseph Bialot. Celui de Maurice Benroubi n'en est pas moins fascinant. Il y a la verve de ce marchand forain autodidacte, débrouillard et sportif, originaire de Salonique, qui comme tant d'autres Juifs du Levant a appris le français avec l'Alliance israélite universelle et en a gardé un amour passionné de la France. Son récit est un cri qui bouscule la chronologie, mêlant l'avant, le pendant, l'après et l'impossibilité d'être entendu. «Je reviens d'un autre univers. J'ai été pétri d'Auschwitz. Je suis étranger au monde qui m'entoure d'autant que personne ne peut imaginer ce que fut la vie là-bas et me comprendre», écrit Benroubi. «J'ai charrié des tas de cadavres et leur peau est restée collée à la mienne», rappelle cet homme qui travailla aux Sonderkommandos qui s'occupaient des chambres à gaz et donc au cœur même du système d'anéantissement. Il sait être simple avec un sens aigu du détail, comme quand il évoque «un petit arbre frêle, chétif, craintif, apeuré» qui a miraculeusement réussi à pousser dans la boue et l'horreur de Birkenau. Mais le grand intérêt de ce livre est de donner en contrepoint du récit du survivant des extraits du journal de sa femme. Elle a échappé à l'arrestation, s'arrange
Critique
«Pétri d’Auschwitz»
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par Marc Semo
publié le 11 septembre 2013 à 19h01
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