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Critique

TOC en stock

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Les déplacements de l’Américain Richard Russo en danger de mère
Richard Russo. (Photo David Ignaszewski)
publié le 11 septembre 2013 à 19h01
(mis à jour le 12 septembre 2013 à 11h06)

A leurs mères folles, les écrivains reconnaissants : Ailleurs est l'histoire d'un romancier de 64 ans nommé Richard Russo, dont la vie, d'un bout à l'autre des Etats-Unis, a été largement déterminée par les angoisses de sa mère, prénommée Jean. Elle est dépressive, caractérielle, ennemie d'elle-même, grande lectrice et pleine de charme. Lorsque Russo a 21 ans, son père qui a fui très tôt lui dit : «J'aurais dû penser plus à toi. Mais c'était facile de t'oublier. Il se passait toujours quelque chose d'autre : un cheval qui ne pouvait pas perdre ou une partie de poker. Tu semblais te débrouiller très bien sans moi.» Après un silence, il ajoute : «Et puis, je ne pouvais pas être ton père sans être marié à cette folle.» Il arrive que la vérité sorte de la bouche des parents, même quand ils vous ont abandonné.

De cage en cage

Jean hait la pauvreté. Sa scène de cinéma préférée est celle où Scarlett O'Hara, ruinée, se taille une robe dans un rideau de velours de Tara. Les TOC (troubles obsessionnels compulsifs) la dévorent, divertissants à lire, moins à vivre. Un jour, elle dit à son fils en pleurant : «Combien de temps vais-je devoir vivre dans une cage ?» Ailleurs est un voyage de cage en cage. Ce sont des maisons, des appartements, les névroses appellent les déménagements.

Comme on est en Amérique, les points de chute sont éloignés : la solitude du névrosé résonne dans le grand vide du territoire et accomplit son road-movie. La mère suit partout son fils, étudi