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Libération
Chronique

Tchernobyl en tête

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publié le 18 septembre 2013 à 21h38

Le Cycliste de Tchernobyl commence aux Champs-Elysées, avenue qui n'est pas spontanément associée à la centrale explosée. Le narrateur est dans un self-service, il lit un article sur le naufrage du Lusitania et repère un homme à une table à côté, d'abord accompagné d'une femme puis abandonné avec ses sacs de vêtements, qui lui semble aussi perdu qu'un «Rescapé du Lusitania». Pendant ce temps, pourrait-on croire faussement puisque c'est à la suite dans le roman, «l'homme de Pripiat se réfugiait dans la cabine des autos tamponneuses». «Oui, tout avait commencé avec les autos tamponneuses.» Mais le lecteur ignore en quoi consiste ce «tout». Il ne l'apprendra pas tout de suite car on en revient au narrateur. Il est à Paris pour participer à la «Conférence internationale des poids et mesures», institution à l'intitulé un peu burlesque mais dont le travail consiste à procéder «à la vérification du poids exact de chaque cylindre pour ensuite certifier dans les territoires de notre juridiction qu'un kilogramme était exactement un kilogramme». A ce moment, le lecteur imagine que le roman est peut-être un texte borgésien, que la vérification de ces poids et mesures va entraîner le narrateur dans une sorte d'abstraction littéraire et paradoxale, qu'une sorte de labyrinthe textuel est en train de se constituer. Or trois pages ne sont pas passées que la police vient chercher le narrateur dont le crime princi