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Libération
Critique

Le voyageur s’absente

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François Beaune collecte des «histoires vraies» tout autour de la Méditerranée
publié le 2 octobre 2013 à 18h06

Pendant un an, il a fait le tour de la Méditerranée. En bateau, à vélo, à pied, on s'en fiche, il n'en dit rien. C'est un récit de voyage dont le voyageur a disparu, qui ne se prend pas pour étalon de ce qu'il voit, se trouve beaucoup moins intéressant que tous ceux qu'il rencontre : «La Méditerranée est une bouche gercée dont la lèvre supérieure s'exprime en latin, et la lèvre inférieure en arabe. Quand elles se touchent pour déglutir, fatiguées de vibrer sans se comprendre, elles embrassent l'univers aux deux pointes centrales, Sicile et surtout Baléares».

Bafouilles. Dans le cadre de Marseille Provence 2013, François Beaune a recueilli en son, en vidéo, par écrit, des «histoires vraies» tout autour de la mer, de Marseille à Güzelbahçe en passant par Régavim ou Tanger. S'il a arrêté sa cueillette en avril 2013 pour écrire ce livre, le projet continue en ligne (1) et, en comparant les récits enregistrés avec la version rédigée, on constatera que Beaune a très peu modifié les phrases originales, déplaçant un complément ici, supprimant des bafouilles là : rien qu'une mise au propre. On se dit, en piochant dans la Lune dans le puits (les récits sont courts, organisés par âge de la vie), quel chanceux ce Beaune, il a réalisé le désir ultime de tout écrivain : se faire récitant, laisser passer en soi la voix humaine, les contes immémoriaux, transmis de souffle en souffle, fondre. Ne plus être auteur, c'est-à-dire être non pl