Dans les livres, on fuit souvent les milieux intégristes ; on s'en sort et on raconte. Il est plus rare qu'on y reste, qu'on choisisse de regarder non derrière soi, mais droit devant, «à l'intérieur», dit Anouk Markovits. Née en Israël et élevée en France, elle a quitté sa famille juive ultraorthodoxe à 19 ans pour échapper à un mariage arrangé, direction l'Amérique où elle a étudié l'architecture et vit aujourd'hui.
Ces fragments biographiques viennent de sa maison d'édition, en entretien elle préfère ne pas s'attarder sur son parcours personnel : Je suis interdite n'est pas un récit, c'est un roman. Lorsqu'elle a commencé à travailler sur ce texte, les agents littéraires l'ont encouragée à retracer sa trajectoire, celle de la jeune fille qui, un jour, est partie se construire ailleurs. Markovits a fait l'exact opposé, choisissant la fiction et la place de ceux qui demeurent : «D'un côté, j'avais fait des choix personnels qui rejetaient le milieu duquel je venais et, de l'autre, je savais que les gens qui choisissent de rester dans ces milieux ne sont pas des intégristes fous, mais des gens comme nous, pleins de désirs et de conflits.» Elle a écrit l'histoire d'une lignée Satmar sur plus de soixante-dix ans, d'avant la Seconde Guerre mondiale à l'après-11 Septembre. L'ensemble est réparti en cinq parties, cinq «livres», comme la Torah.
Jupe. Transylvanie, 1939 : le petit Josef est sauvé par une fermière non juiv