A l’hiver 1944, avant d’aller se battre en Europe, le soldat Robert Prentice, 18 ans, suit ses aînés dans les rues froides de Baltimore. L’un d’eux disparaît avec une fille : «Prentice gloussa, mais il ne put s’empêcher d’être troublé. Il ne s’était pas autorisé à penser qu’ils finiraient dans une maison close, ni qu’ils ramasseraient des filles dans un bar ou fassent ce qu’on était censé faire en pareille situation, mais que pouvait-on espérer faire de mieux d’une dernière nuit de liberté aux Etats-Unis ?» Pas grand-chose, et c’est dans ce pas grand-chose, ce tiroir à double fond séparant l’illusion de l’espoir et l’espoir de l’échec, que se déposent les vies américaines de Richard Yates.
Un destin d'exception est son troisième livre. A sa publication, en 1965, il n'eut aucun succès : son réalisme classique et parfaitement construit n'était plus dans l'air du temps. Yates allait avoir 40 ans. Ensuite, il écrivit peu, toujours bien. Il est mort en 1992. Il a fallu attendre les années 2000 pour que ses livres soient traduits ou retraduits en français, et leurs qualités partout reconnues. Les Américains ont une peur noire des ratés, c'est pourquoi une bonne partie de leur littérature ne parle que de ça. Yates y tient une place de premier choix.
Barreaux. Un destin d'exception, titre à la fois ironique et tendre, explore parallèlement deux «destins» - ces lieux discrètement tragiques où se confrontent