«Soyez incommodant. Soyez le grain de sable dans les rouages du monde, pas la goutte d'huile. Un grain de sable ? Fallait-il me laisser réduire à néant ? Me laisser moudre ? C'était abject. On pouvait sûrement être le bâton proverbial dans les roues de l'oppression plutôt qu'une poignée de poussière, non ? Mieux vaut être le marteau que l'enclume.» Les questions d'identité individuelle étaient difficiles à résoudre dans l'Afrique du Sud de l'apartheid. Ivan Vladislavic est né en 1957 et vit à Johannesburg. Double Négatif est son sixième livre traduit (après, en particulier, Clés pour Johannesburg) et sa version originale est parue accompagnée d'une luxueuse édition de son ami photographe David Goldblatt (né en 1930, il a reçu le prix Henri Cartier-Bresson en 2009).
Le texte commence quand le narrateur renonce à ses études, dans l'espoir de vivre enfin pour de bon, ce qui ne se révèle pas du gâteau. Il passe une journée avec un photographe plus âgé. «Disons qu'il y a un déséquilibre en moi, que les plateaux de ma balance ne sont pas de niveau et que quelque chose quelque part dans ces rues peut les ramener à l'équilibre.» Le photographe veut entrer dans une maison habitée par une Noire. Il le fait avec les meilleures intentions du monde. «D'un autre côté, peu importait qu'elle comprenne nos intentions. Elle ne pouvait pas se méprendre sur ce que nous étions : nous étions des Blancs. Nous allions faire comme il nous plairait.»