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Conte défait

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Le cahier Livres de Libédossier
Thomas Harlan s’adresse à son père, l’auteur du film nazi «le Juif Süss»
John Stezaker, «Interior Mask II» (2013) (Courtesy Gallery Capitain Petzel, Berlin)
publié le 23 octobre 2013 à 19h16

SPECIAL FIAC. Le commentaire de Xavier Franceschi, directeur du Frac Ile-de-France: «Ce qui est extraordinaire dans cette œuvre de John Stezaker, c'est cette simplicité de moyens – deux photographies collectées (dont l'une "de plateau", issue du cinéma) ; un collage pour un effet saisissant : par ce jeu de coïncidences apparaît une faille, une sorte de béance dans le visage du personnage. On est à l'intérieur à plus d'un titre, l'ensemble revêtant incontestablement une dimension psychanalytique : on masque et on découvre à la fois…»

Il y a un texte, et il y a un livre. Le texte, c'est une sorte de «lettre au père» posthume de Thomas Harlan (1929-2010), fils de Veit Harlan (1899-1964), le réalisateur du film nazi le Juif Süss. Une lettre sur la culpabilité, l'amour, l'irrémédiable. Le livre, c'est ce même texte, assez bref, interrompu d'une série de longues notes, auxquelles renvoient non des numéros mais des soulignements, comme des liens hypertextes. Il s'agit la plupart du temps de précisions historiques. Cette discontinuité n'est pas gênante, au contraire, elle vient scander le texte de Thomas Harlan comme un travelling de pierres tombales, s'y ficher comme les stèles d'un mémorial de l'Holocauste dont elle rappelle les horreurs : «Les Allemands avaient une basse-cour de plusieurs centaines d'oies et lorsque les Juifs se mettaient à crier, on lâchait les oies pour que leur caquètement couvre les hurlements.» (Claude Lanzmann, cit