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Libération

L’union de l’argent ou le prix de la fiction

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Le romancier et dramaturge hongrois Péter Nádas regrette l’incapacité de l’UE à réguler les marchés financiers au nom de la sacro-sainte croissance.
par Péter Nádas, Dernier ouvrage paru : Péter Nádas. Histoires parallèles (Plon, 2012)
publié le 30 octobre 2013 à 19h56

Les gouvernements européens disposent d’assez d’outils constitutionnels pour harmoniser intérêt général et intérêts particuliers. Et Bruxelles - en théorie du moins - devrait fonctionner comme l’usine à gaz capable de mener à bien cette opération délicate. Une raison spéciale explique sans doute son incapacité à réguler la marche des gouvernements européens dans l’esprit même de la communauté démocratique. Depuis vingt ans, l’économie de marché ne cesse d’engendrer des anomalies en court-circuitant les instances de contrôle démocratiques. Rien n’affecte plus sensiblement les mégapoles du globe. Dès que se détraque le moindre rouage de leurs infrastructures, l’économie de nations entières, voire du monde entier, en subit le contrecoup de plein fouet. Pour se financer, les mégapoles ne disposent d’aucun autre moyen qu’accroître encore le montant astronomique et chaque jour plus impayable de leurs dettes. Or, les bailleurs de fonds veulent revoir leur argent, non pas à la Saint-Glinglin, mais à l’échéance. Et ils en revoient la couleur.

Cela implique trois conditions rigoureuses. Primo : loin de réguler l’économie, c’est à l’économie que la politique doit céder le contrôle. Ce qu’elle a fait. Deuzio : pour continuer de s’enrichir à coups d’opérations immobilières, de produits dérivés, de prêts toxiques et autres crédits revolving, les institutions financières doivent pouvoir pratiquer un commerce toujours aussi mondial - délocalisé. Elles n’opèrent pas autrement. Tertio : la soc