Toute son existence, l’écrivain allemand Arno Schmidt s’est attaché à écrire des «livre [s] comme il n’en existe pas encore», des textes traversés par l’Histoire, la nature, l’Antiquité ou le XVIIIe siècle. L’ADN de ses livres est emprunté autant à sa vie (très intérieure) qu’à celle des autres : vies passées ou présentes, vies réelles ou fictionnelles, entrevues, découpées, photographiées ou étudiées au biographème près et à la milliseconde. Ce monde est celui d’un artiste, il l’a méticuleusement construit, nommé, décrit, rythmé, cartographié, mis en page, travaillé comme une partition et ses dernières publications ont consisté dans le simple fac-similé de ses volumineux tapuscrits. Si Borges se voulait bibliothécaire hétérodoxe, Schmidt est plutôt un archiviste hallucinant mettant en fiches les failles souvent tragiques ou carnavalesques de la langue et de la réalité : autant dire un aventurier de l’écrit et des littératures comme il n’en existe que bien peu par siècle.
Né en 1914, Arno Schmidt a quitté la planète en 1979. On s’apprête à célébrer le centenaire de sa naissance. Arte diffusera le 15 janvier un documentaire réalisé avec talent par Oliver Schwehm : Arno Schmidt, le cœur dans la tête et Tristram publie une nouvelle traduction des Scènes de la vie d’un faune, qui avaient contribué à révéler Schmidt au lecteur français en 1961. Aussi, loin d’être un inconnu, Schmidt est sur les rayonnages français depuis