Une appréhension avant de rencontrer Samantha Geimer. De quoi va-t-on parler ? Elle a 50 ans, c'est arrivé quand elle avait 13 ans, cela fait donc trente-sept ans qu'on la harcèle avec ce qu'elle qualifie tantôt de «viol», tantôt de «mauvaise expérience».Un demi-siècle, donc. Et très peu l'occasion d'oublier qu'elle a été «la fille» abusée par un cinéaste célèbre, et de se définir en dehors de cette dizaine de minutes en comptant très large, dit-elle. Est-ce qu'on pourrait parler d'autre chose ? A-t-elle une vie en dehors de cette poignée de minutes ? «Oh, elle n'a aucun intérêt. Je suis une working mum américaine», secrétaire, trois grands enfants, le même mari cow-boy, Dave, depuis vingt-cinq ans, vivant à la campagne sur l'île d'Hawaï, beaucoup de chiens, un fauteuil au coin du feu, pour un peu, on dirait une chanson de Rezvani pour Jeanne Moreau, sauf que la réalité fut beaucoup moins douillette.
Samantha Geimer est blonde, bien maquillée, les dents bien rangées, «en pleine forme», dit-elle, des santiags, une absence de prétention évidente. Mais voilà qu'elle se remet sous la lumière avec le sujet même dont elle clame qu'elle ne veut plus entendre parler, pour vendre un récit sous-titré : «Ma vie dans l'ombre de Roman Polanski.» On lui demande : «Pourquoi ? Tout n'avait donc pas été écrit ? Ou élucidé par le documentaire, en 2009, de Marina Zenovich, Roman Polanski, wanted and desired ?» Samantha Geimer :