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Libération
Entretien

Rubén Gallo, à la recherche du serpent à plumes

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Rencontre avec le dandy mexicain
L'universitaire mexicain Rubén Gallo chez lui, à New York. (Photo Pascal Perich)
publié le 27 novembre 2013 à 17h16

Le père de Rubén Gallo vendait des balances à Guadalajara, une ville de province mexicaine que son fils compare à Lyon, sans qu'on puisse y voir une quelconque forme de compliment. L'un de ses frères a repris la boutique paternelle. Rien ne destinait donc l'élégant et sensible polyglotte de 44 ans à diriger le département d'études latino-américaines de l'université de Princeton, New Jersey, ni à écrire des livres aussi surprenants et divertissants que Freud au Mexique, publié aujourd'hui en France, ou les Latino-Américains de Proust, qui paraît cet hiver aux Etats-Unis. Rien, sauf peut-être le goût d'explorer l'autre plateau de la balance, celui des esprits migrateurs, de tout ce qui fait de l'universitaire mexicain un étalon bienveillant et simplifié de cosmopolitisme, un rêveur au trébuchet aussi finement taillé qu'un costume de Dior ou une robe de Saint Laurent.

Aujourd'hui, Guadalajara est le siège de l'une des grandes foires du livre hispano-américain. Dans les années 80, c'était d'abord une ville conservatrice où rêver d'autres mondes et être homosexuel n'apportait à un adolescent aucun supplément d'oxygène. On devait y ressembler à l'un de ces individus masqués, qu'ils soient juifs ou pédés, dont Proust a fait des portraits si cruellement remarquables. Un jour, un ami amène le jeune Rubén dans le café de la ville où se réunissent, aurait écrit celui qu'il n'avait pas encore lu, les invertis : «C'était un bar où il n'y avait que des pères de famill