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Libération
Critique

Le Carré recadre l’ère Blair

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Le pape du roman d’espionnage à l’assaut des duperies des politiques.
Gibraltar, où a lieu une opération clandestine d'enlèvement. (Photo Paul Hanna. Reuters)
publié le 4 décembre 2013 à 17h56

On a écrit le pire sur les lugubres années Thatcher et le roman noir britannique a bien joué son rôle. Sur les années Blair, de très bons auteurs, aussi, se sont employés à démasquer le sale type sous les oripeaux de la respectabilité et de la morale. On peut citer Robert Harris, avec l'Homme de l'ombre (adapté au cinéma par Polanski, sous le titre The Ghost Writer), parabole politico-policière sur le mensonge d'Etat. Mais, chez ceux qui ont suivi ces dix années de duperies sans vergogne, notamment lors de la guerre en Irak, perdurait l'impression que tous les masques n'étaient pas encore tombés, que l'illusionniste du New Labour - et fidèle ami de George Bush - avait encore deux ou trois tours de passe-passe d'avance que personne n'avait encore mis en lumière. Avec le dernier roman de John le Carré, le projecteur revient éclairer la scène diplomatique de ces mêmes années Blair, ou plutôt l'arrière-scène.

Les héros de John le Carré n’ont pas changé. Ce sont toujours des serviteurs de l’Etat, petits et grands, les uns avec l’ambition chevillée au corps, les autres en proie aux insomnies d’une conscience malmenée ou avec un sens du devoir qui se marie mal aux exigences sécuritaires de l’heure. Cette fois, nous suivons les affres de Kit Probyn, fonctionnaire candide et un peu fade du Foreign Office, à qui son ministre, homme du peuple devenu politicien avide et arrogant, avec menton agressif et nœud papillon, demande d’être son «téléphone rouge» lors d’une opér