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critique

Les freaks fantômes

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Robert Bogdan analyse le goût des monstres de foire aux Etats-Unis, jusqu’à leur disparition après-guerre
publié le 4 décembre 2013 à 17h56

L'exhibition dans des cirques de personnes présentant des anomalies physiques ou mentales, réelles ou simulées, ferait aujourd'hui scandale. Les freak shows, dont l'origine remonte aux foires anglaises de la Renaissance, font pourtant partie intégrante de la culture américaine entre 1840 et 1940 et sont alors considérés comme tout à fait fréquentables, même par les classes supérieures. Si New York s'impose après la guerre de Sécession comme la capitale de ce genre de divertissements, ces derniers se diffusent à travers tout le pays avec les dimes museums, les cirques - principal divertissement de l'Amérique populaire jusqu'en 1920 - ou ces précurseurs de Disneyland que sont les parcs d'attraction comme celui de Coney Island.

Homme-otarie. Le goût du public pour ces spécimens s'explique d'abord, bien sûr, par l'attirance pour la bizarrerie et la différence, comme celle des deux sœurs siamoises Daisy et Violet Hilton, de l'homme-tronc Johnny Eck ou du nain Tom Pouce, dont le mariage avec la naine Lavinia Warren est spectaculairement mis en scène à des fins publicitaires. Il y a aussi un engouement pour des questions scientifiques alors dans l'air du temps, ce qui donne aux freak shows un air plus crédible et respectable. Les débats sur la race et l'hybridation attribuent ainsi certaines malformations à un croisement entre l'homme et l'animal, justifiant les appellations d'homme-grenouille ou d'homme-otarie. Les Am