Un cœur qui bat. La «boîte noire d’un corps de vingt ans», embarqué dans une vague sur une côte du Pays de Caux. Dans une aube glacée, un jeune homme dans sa plénitude surfe sur une onde venue du fond de l’océan. Simon Limbres ne sera connu que par cette quête de sensation extrême dans un matin vert-de-gris. Instrument d’un contre-la-montre qu’il ignore encore. Car le héros du dernier livre de Maylis de Kerangal, c’est son cœur. Le cœur, acteur d’une épopée contemporaine, saisi sur l’écume pour se retrouver vingt-quatre heures plus tard via une circulation sans faille entre tous les vivants qui l’escortent transformé en don. Réparer les vivants est le roman d’une transplantation cardiaque.
Balance. Le titre peut apparaître clinique. Comme le sujet. Qui ne connaît pas le Platonov de Tchekhov ne sait pas qu’il manque un temps, une mesure, une balance : «Enterrer les morts et réparer les vivants.» La deuxième partie induit la consolation, la renaissance. «C’est une phrase que je connaissais qui s’est réactivée en moi dans le sillage de deuils personnels récents, avance Maylis de Kerangal. Je me disais : il faut penser à ceux qui restent.» La danse première de Simon Limbres stoppée brutalement aboutit à la réparation du cœur défectueux d’une femme. Une pièce est remplacée dans une machine humaine. Au-delà de l’image du mécanicien à l'œuvre, réparer induit aussi un sens spirituel. A la différence de son court texte paru en 2007,