Chaque courant de pensée a sa propre géographie, ses ancrages, ses lignes de traverse et ses zones floues. Pour les cultural studies, dont l'un des hérauts, Stuart Hall, est décédé lundi à l'âge de 82 ans, la France a longtemps été une zone obscure. Quasiment inconnu ici, le sociologue était une figure intellectuelle marquante au Royaume-Uni. Pour preuve les abondantes nécrologies dans la presse anglaise d'hier.
Né en 1932 à Kingston (Jamaïque) dans une famille de la classe moyenne, il connaît, adolescent, la fin de l'ère coloniale, le délitement de l'autorité britannique et la différenciation raciale et sociale qui agite le pays. En 1951, grâce à une bourse, il part étudier à Oxford, dans l'œil du cyclone de la domination d'alors. The Guardian rapporte qu'à son arrivée au Royaume-Uni, il trouve les paysages familiers décrits dans l'œuvre de Thomas Hardy. Stuart McPhail Hall reste en Grande-Bretagne, devient professeur. En 1964, il est invité par Richard Hoggart à rejoindre le nouveau Centre for Contemporary Cultural Studies, situé à Birmingham, où officiera aussi Raymond Williams.
Prisme. Depuis ce laboratoire universitaire bouillonnant s'invente une discipline, dont l'écho sera magistral sur la sphère universitaire anglo-saxonne. Hall prend au fur et à mesure la tête de l'entité, définissant les bases d'une relecture de la culture qu'il voit, ainsi que Libération le qualifiait en 2006, comme le «lieu d'affr