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chronique

Roth, poids superlourd

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publié le 12 mars 2014 à 17h16

Il est rare qu'un écrivain pose sa plume pour entreprendre le bilan critique de l'intégralité de son œuvre. Philip Roth est de ce genre-là. Au quotidien suédois Svenska Dagbladet, il vient de confier : «Quand j'ai décidé d'arrêter d'écrire il y a cinq ans, je me suis assis pour relire les 31 livres que j'ai publiés entre 1959 et 2010. Je voulais voir si j'avais perdu mon temps ou pas. On n'est jamais sûr, vous savez.» La conclusion ? Philip Roth aurait-il mieux fait d'aller à la pêche que de noircir du papier pendant un demi-siècle ? A-t-il consacré à l'écriture un temps qui lui aurait permis de baisser sensiblement son handicap au golf ? Vous le saurez dans quelques secondes, mais avant, ceci.

Que l'interview de Roth soit parue dans un journal suédois n'est pas surprenant : c'est Stockholm qui décerne le prix Nobel de littérature, or, comme chacun sait, l'écrivain américain a été donné plusieurs fois favori, tant et si bien qu'il semble avoir déjà pris son billet d'avion pour aller serrer quelques pognes à l'académie suédoise. L'auteur de la Tache - seul romancier américain vivant dont l'œuvre est éditée par la Library of America, sorte de Pléiade officielle - s'est peu à peu statufié sous les honneurs, les pigeons viendront bientôt lui chier sur la tête.

Donc Philip Roth s'en va causer aux Suédois pour balayer les quelques ombres qui ternissent encore sa réputation, au nombre desquelles une accusation de misogynie. «Misogyne est un mot dont on