Menu
Libération
Critique

Le sens de la marche

Article réservé aux abonnés
Le cahier Livres de Libédossier
Antoine de Baecque parcourt le GR5 en promeneur solitaire et érudit.
Antoine De Baecque met une veste d'historien et des notes en bas de page. Il raconte l'histoire des sentier des grandes randonnées. (Photo Sylvertwyst. Flickr)
publié le 19 mars 2014 à 18h26

Cet article a été réalisé dans le cadre du «Libé des écrivains».

Lire vous emmène en voyage. Lire vous fait marcher, surtout si vous aimez l’une et l’autre activité. Mais écrire en marchant ? Dans

le Chant des pistes,

Chatwin racontait comment les Aborigènes chantent le paysage pour le faire accéder à l’existence et retrouver leur chemin. Se peut-il que la littérature offre dans nos pays de sédentaires un équivalent aussi merveilleux ?

La

Traversée des Alpes

d’Antoine de Baecque ne remonte pas à nos ancêtres les nomades, mais ce n’est pas le pire endroit pour trouver des bouts de réponses, écrits tantôt avec la tête, tantôt avec les pieds. La schizophrénie assumée fait la singularité de cet «Essai d’histoire marchée»

.

Qu'écrire en marchant ? Première réponse (pile). De Baecque met une veste d'historien et des notes en bas de page. Il raconte l'histoire des sentiers de grande randonnée. C'est synthétique, fluide, mais ça ne rigole pas. La typographie est helvète, le phrasé précis donne du sens à l'ennui en vous emmenant un peu au-delà. Convocation des «ancêtres». Rousseau, dès l'âge de 16 ans, marche de Genève à Turin : «Je ne puis méditer qu'en marchant. Sitôt que je m'arrête, je ne pense plus et ma tête ne va qu'avec mes pieds.» (note : les Confessions, livre quatrième, op cit). Claude Lévi-Strauss jeune aime le dialogue entre son effort physique et le «paysage debout» des Cévennes : «Chaque goutte de