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critique

Annie Ernaux vigie chez Auchan

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La vie dans les rayons.
De novembre 2012 à octobre 2013, Annie Ernaux a fait comme d’habitude, avec un but supplémentaire: des pages à remplir, en plus de son chariot. (Photo AFP)
publié le 26 mars 2014 à 17h26

Le poste d’observation choisi par Annie Ernaux pour «Raconter la vie» (dispositif éditorial conçu au Seuil par Pierre Rosanvallon, voir

) est l’hypermarché tel qu’il se conçoit depuis les travées. Les gens qu’on y croise, «employés et clients», les «stratégies commerciales» mises en œuvre. Selon la romancière, c’est pour chacun d’entre nous l’endroit par excellence où croiser régulièrement «ses semblables».

Dans Journal du dehors (Gallimard, 1993), puis la Vie extérieure (2000), elle avait déjà noté des «choses vues» dans les grandes surfaces. Elle reprend le mode du journal dans Regarde les lumières mon amour.

La phrase est d’une mère penchée sur la poussette de sa petite fille pour lui montrer les guirlandes de Noël. De novembre 2012 à octobre 2013, Annie Ernaux a fait comme d’habitude, elle a pris sa liste de courses et elle est allée à Auchan, celui de Cergy où elle habite et qui se trouve à l’intérieur du centre commercial des Trois-Fontaines. Simplement, elle avait un but supplémentaire : des pages à remplir, en plus de son chariot.

Auchan n'est pas tout à fait pour Annie Ernaux le même objet littéraire que pour Marguerite Duras dans les années 70, «l'endroit où l'on vend tout pour les vivants, même des cercueils, c'est là que l'on voit le monde». L'auteur du Camion a le regard poétique, porté au mythe. L'auteur des Années s'astreint à une simplicité conviviale. Première entrée du journal : «Il fait f