La mort de Richard Hoggart, jeudi à l'âge de 95 ans, a le même effet que celle de son compagnon de route, Stuart Hall, il y a deux mois (lire Libération du 12 février) : la presse britannique multiplie les hommages à une figure marquante de la vie intellectuelle anglaise, tandis qu'en France, la nouvelle passe pour confidentielle, si ce n'est dans le registre des sciences sociales. Dans ce domaine, où Hoggart (comme Hall) est tenu pour un des pères des cultural studies, l'homme est associé à un ouvrage fondateur, la Culture du pauvre, publié au Royaume-Uni en 1957. Les cultures scientifiques diffèrent et les méthodes aussi.
Posture. Si les travaux de Hoggart ont eu une telle portée sur la pensée critique anglo-saxonne, c'est qu'il a su entremêler autobiographie et analyse sociologique. Né dans un quartier ouvrier de la région de Leeds en 1918, dans une famille misérable, orphelin à 8 ans, il profite d'un système de bourses, étudie la littérature. Après la Seconde Guerre mondiale, il intègre l'université de Hull, où il enseigne dans le département de formation professionnelle. C'est alors qu'il rédige The Uses of Literacy (la Culture du pauvre), croisement entre souvenirs d'enfance et ethnographie des classes populaires. Il décrit, sans jugement, le fonctionnement des