Laird Hunt est ravi d’être de passage à Paris. Il y a étudié les lettres modernes à la Sorbonne dans les années 80, en a gardé un français impeccable. Ici, on ne s’étonne pas que ses livres peinent à entrer dans une forme, on le félicite pour cela.
Les Bonnes Gens,
son quatrième traduit chez Actes Sud, fait entendre au moins deux voix. La première est celle de Ginny, femme blanche qui, au soir de sa vie, relate les événements qui se produisirent, avant la guerre civile, dans la ferme où elle vécut avec son mari ; la seconde, celle de Zinnia, l’une de ses deux domestiques noires. Jeux de masque et de pouvoir, elles vont assouvir leur vengeance et, à leur tour, torturer leur maîtresse. Le sujet, porteur, vaut à Hunt prix et visibilité augmentée dans son pays, au point de se sentir
«un peu à l’écart de [lui]-même».
Les marges lui conviennent.
Le titre original, Kind One («gentille»). Pourquoi ?
C'est un titre qui renvoie à la Grèce antique, aux Furies. En France, vous avez eu ce grand livre, les Bienveillantes de Jonathan Littell. C'est à peu près la même idée. Ces femmes dans le Kentucky qui sont bourrées de rage, contre le monde, contre l'univers, contre ce système terrifiant de l'esclavage. Je voulais avoir ce sens-là dans le titre, mais aussi le sens plus simple de ces gens qui ont fait des choses par pure gentillesse. Quelqu'un m'a dit qu'il y avait beaucoup de porcs et de fleurs dans ce livre, c'est ce mélange qui m'intéresse.
Pourquoi insister sur la singularité ? Pourquoi «one» ?
Parce que, même si c'est une histoire à plusieurs voix, il y a quelqu'un au