«Je suis dans une merde noire ! Tu as vu, les vieux ont dit oui. Et maintenant il faut que je l’écrive, ce putain de discours d’hommage à ce vieux collabo de Félicien Marceau ! Si tu ne me files pas un coup de main, je suis mort.
- Finkie, tu as vu l’heure ? Je venais juste de m’endorm…
- Toi qui as aidé Robbe-Grillet à faire son discours de réception, tu peux bien m’aider moi, ton plus vieil ami ! Au nom de nos années maos, je te somme de me secourir !
- Mais Robbe, il ne l’a jamais prononcé, mon discours : il n’a jamais mis les pieds sous la coup…
- Moi, je vais y aller. Je vais poser mon cul dans le fauteuil de cet enfoiré de Marceau, et ce soir j’ai 50 000 signes à rédiger pour faire l’éloge de cet antisémite ! Moi, Alain Finkielkraut, fils d’un maroquinier juif déporté à Auschwitz, tu te rends compte !
- Calme-toi. D’abord, il n’y a pas d’urgence, ta réception ne se fera pas avant l’année prochaine. Ensuite, il suffira de…
- Il suffira de rien du tout ! J’ai un crayon en main, vas-y, dicte !
- Euh… Bon. Tu te souviens, en 1977, quand Alain Peyrefitte a été élu au fauteuil de Paul Morand ? Pas facile non plus, l’éloge du prédécesseur, hein ? Tu as lu la correspondance Morand-Chardonne ?
- Je m’en fous, dicte.
- Peyrefitte n'y est pas allé avec le dos de la cuillère. Au bout d'une heure de discours, il a commencé à lâcher des trucs comme : «Munich, Vichy, collaboration, résistance : de 1938 à 1944, chaque Français a suivi son cheminement personnel et compliqué vers des choix c