Les ruines fumaient encore lorsqu’ils quittèrent Hambourg. En quatre jours et trois nuits, l’incendie avait dévoré près d’un quart de la ville. Carbonisé leur toit. Leur famille. Leurs amis. A quoi bon dans ces conditions rester en Allemagne ? Les deux miraculés sautent dans un bateau. Peut-être que la mer apaisera la douleur des flammes. Première escale : Sydney, en Australie, où ils ouvrent une pension. En 1859, ils font partie de la première vague de colons à s’installer en Nouvelle-Calédonie, dans la petite ville de Gadji. Le couple affronte la sécheresse, les maladies, les invasions de criquets. Maintient tant bien que mal une paix fragile avec les indigènes. Elle devient sage-femme dans la brousse. Il construit la première école laïque ouverte aux Blancs et aux Kanaks.
«Anomalie». Eux, ce sont les arrière-arrière-grands-parents de Frédéric Ohlen. Le poète néo-calédonien leur rend hommage dans Quintet, son premier roman. «A u départ, il s'agissait bien d'un certain devoir de mémoire : rendre compte de la vie et de l'œuvre de Maria Dohrn et Heinrich Ohlen, explique l'auteur par mail. Ce qui persistait d'eux dans la légende familiale m'avait, très jeune, intrigué. Il y avait dans leur couple, dans leur présence même, une anomalie fondamentale que j'ai tenté d'élucider.» Tout en laissant «une sacrée part à l'imaginaire», l'écrivain s'est imprégné de documents d'époque pour retracer la vie de