Si l'art consiste à ajouter de nouveaux objets au monde, on doit aussi accepter que les artistes puissent le mystifier. De là la littérature dans la littérature, les tableaux dans les tableaux, les films dans les films, etc. Dans cette régression à l'infini, ces jeux de miroirs en arrivent toujours non tant à concurrencer le réel qu'à le faire disjoncter, en le court-circuitant par l'imaginaire. C'est anthropologiquement la préhistoire du virtuel, de la manipulation des textes et des images, un temps où l'on imaginait de faux écrivains et de faux livres, une époque où les mystificateurs amusaient et où de manière plus aimable les arts inventaient le phishing.
Référence. De A chacun son rôle, pièce que répètent les comédiens dans Six Personnages en quête d'auteur de Luigi Pirandello à Zénobie de William Shakespeare, imaginée par Jack McDevitt dans The Fort Moxie Branch, Stéphane Mahieu propose un dictionnaire des livres imaginaires. Le sujet n'est pas inédit, les bibliographes du XIXe siècle l'avaient abordé autour d'un des fondateurs de cette pratique de la référence excentrique : François Rabelais et son célèbre catalogue de la Bibliothèque de l'Abbaye de Saint-Victor dans Pantagruel. Le bien nommé Bibliophile Jacob alias Paul Lacroix et Gustave Brunet professaient la même passion que le conservateur de la Bibliothèque de l'Arsenal, Charles Nodier, pour ce que l'on nommait