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critique livres

Bourlingueur des grammaires

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Jean-Pierre Minaudier défend la dimension poétique d’une matière souvent jugée rébarbative, en pourchassant les langues du monde entier
«Papouasie», fin 2008. (Photo AFP)
publié le 18 juin 2014 à 18h06

Une grammaire peut se lire comme un roman policier. Ce n'est pas la moindre des révélations de ce petit précis iconoclaste de Jean-Pierre Minaudier, accessoirement traducteur de l'estonien. Sans crainte de décourager les rétifs à la syntaxe. «Ma conviction profonde est qu'une grammaire, c'est avant tout du rêve et de la poésie - je répète pour le dernier rang qui bavarde : une grammaire, c'est avant tout du rêve et de la poésie.» A ceux, nombreux, qui ont toujours jugé la matière rébarbative et se souviennent avec aversion de leur Bled scolaire, il démontre toute la jubilation qui consiste à dévorer des pages de déclinaisons ou de prononciations exotiques. Un bon manuel peut ainsi valoir un Agatha Christie ou un Michael Connelly : il fait pénétrer l'amateur éclairé dans un univers semé d'indices. Jean-Pierre Minaudier se plaît souvent à subodorer que la langue dont il est question, surtout si elle fait partie d'une famille déjà familière (comme l'athapascane…), fonctionne de telle ou telle manière. « On se dit, tiens c'est peut-être la crémière qui est coupable, non c'est le facteur et puis à la fin on découvre qu'il s'agit du menuisier», raconte-t-il avec une délectation non feinte.

Larcin. Passionné de linguistique, Jean-Pierre Minaudier, 53 ans, ne l'a pourtant jamais étudiée. Diplômé de l'Ecole normale supérieure et professeur d'histoire en khâgne, il a inventé très jeune une nouvelle langue, le chirois, dont il deme