S’il y a de l’ours, c’est qu’il y a des forêts. Un peu anciennes, tout de même, car de nos jours on ne croise plus beaucoup de plantigrades au détour d’un sentier. Une forêt, c’est-à-dire l’inconscient des contes de fées, ou du moins un imaginaire - ça change des romans qui se passent en ville. Sans avenues, on progresse avec difficulté, il y a des embûches, parfois on s’assoit pour méditer, en général on finit par trouver le cœur du danger (ogre, sorcière, puits).
La Peau de l'ours, ça sent l'inouï : «Un pacte avait été conclu entre l'ours et les villageois. Un accord si ancien que son origine se perdait, qu'il semblait avoir été passé pour l'éternité, sédimenté à jamais dans la roche de la grotte.» L'espace était déjà fouillu, voilà que le temps nous quitte, l'écriture devient éternité, phylactère enfermant les sédiments des commencements. C'est une histoire de métamorphose (le pacte sera rompu, les catastrophes déboulent) mais rien à voir avec Kafka, ni le Chat Murr de Hoffmann : pas de satire ni d'introspection ricanante.
Photosensibles. Joy Sorman trace plutôt la généalogie d'une malédiction, celle d'être homme sans doute, ou femme, si l'on note que le féminin l'emporte dans la seconde moitié du récit, devient le point de vue : «Car seules les femmes savent, raconte le narrateur ours, seules les femmes ont vu l'homme et ont vu l'ours réunis sous la même peau, les femmes photosensibles, au regard