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Libération
Critique

Sortie de champ pour Mary l’obscure

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Une petite paysanne dans l’Angleterre puritaine du début du XIXe siècle plonge sa plume dans «la Couleur du lait».
(Photo Dan-Scape.co.uk. Flickr)
publié le 17 septembre 2014 à 17h16

Les femmes ont vocation à souffrir, mais elles l’ont un peu cherché. Elles ne sont pas innocentes, leur destin est en quelque sorte prévisible. Résumée ainsi, la leçon à tirer de

la Couleur du lait,

premier roman traduit en français de l’écrivain anglaise Nell Leyshon, renvoie à l’œuvre d’un illustre romancier anglais : Thomas Hardy était hanté par le malheur qui s’abat sur ses héroïnes, même si elles doivent en répondre. De celles-ci, Gide disait qu’elles portent en elles leur fatalité. Tandis que l’écrivain John Cowper Powys, grand admirateur de son compatriote Hardy, voyait en lui

«le seul grand pessimiste de notre littérature, s’il n’y avait pas Shakespeare. Shakespeare est le seul écrivain hardiesque que nous possédions».

Héritage. La Couleur du lait de Nell Leyshon s'inscrit dans cette haute tradition, extrêmement romanesque et terriblement tragique. Le décor du roman lui-même participe de cet héritage : la campagne anglaise, tellement identifiable et obsédante, est un personnage à part entière de Leyshon. Les saisons aussi, qui scandent le roman en chapitres, et rappellent qu'elles sont le tourment récurrent chez les paysans. «Au commencement» - l'allusion à la Bible est ici particulièrement bienvenue, elle fait aussi partie du décor - sont quatre jeunes filles, paysannes misérables, soumises à la brutalité du père et à l'austérité de la mère. Une ferme miteuse, quelques arpents caillouteux, une vac