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Libération
critique

Le mélo du guerrier

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La vie en pointillés de Jack l’Irlandais par Sebastian Barry.
publié le 8 octobre 2014 à 19h56

Sebastian Barry a coutume de tisser des liens entre ses romans. Il n’est pas nécessaire d’avoir lu les Tribulations d’Eneas McNulty (Plon, 1999) et le Testament caché (Joëlle Losfeld, 2009) pour suivre l’Homme provisoire, mais on y retrouve la même famille irlandaise, les McNulty. La parole est ici accordée à Jack qui, en 1957, au Ghana, entreprend de rédiger son histoire. La narration donne l’illusion de l’écriture, comme dans Du côté de Canaan (Joëlle Losfeld, 2012) où une dame s’interrogeait : «Quel bruit fait le cœur d’une femme de 89 ans quand il se brise ?» Là encore le cœur est brisé, «un moteur négligé qui affaiblit toutes les autres pièces» et qu’il faut réparer. Se réparer soi pour devenir «un homme meilleur», car Jack n’a été qu’un «homme provisoire», un homme d’allers-retours, engagé en pointillés par l’armée britannique. Le premier chapitre le fait survivre à l’attaque d’un navire en route pour la colonie d’Accra, mais la suite ressemble à un grand naufrage personnel : l’alcool, les dettes de jeu, la fuite, et une femme, épouse et mère, qui n’en finit pas de couler.

«Bobine». La première fois que Jack McNulty vit Mai Kirwan, c'était en 1922, à l'époque de la guerre civile. Elle avait 19 ans et «palpitait à [s]es yeux comme une bobine de film» . M. Kirwan n'aimait pas beaucoup Jack, qu'il appelait «le buveur de Sligo» dans son dos. Jack demanda sa main