Christophe Donner a écrit son meilleur livre à 58 ans : un livre plein de chiqué, réussi parce que c’est du chiqué.
Quiconque…
est le roman d’une gouape héroïque et électrique, petit prince du gaspillage, de l’inventivité et du clinquant. Cette gouape est le producteur franco-libanais Jean-Pierre Rassam, météore du milieu, l’homme qui produisit
Nous ne vieillirons pas ensemble
de Pialat,
la Grande Bouffe
de Ferreri,
Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil
de Jean Yanne,
Tout va bien de Godard,
Tess
de Polanski, on ne cite qu’une partie du carton qui lui donne accès au salon Paradis. Sa puissance et sa gloire sont brèves, intenses, épileptiques, de 1971 à 1974. C’est le genre de type qui habite au
Plaza Athénée et vit à bout de souffle, des idées plein les yeux, des billets plein les poches, des verres plein les mains et de la coke plein le nez : un funambule sur le fil de la création, de l’amitié, de la cavalerie et du suicide. Sa devise pourrait être :
«Quand tout est foutu, tout devient possible.»
En 1968, à Cannes, il pousse le film qu’il a produit,
Au feu les pompiers
de Milos Forman. Il veut la palme, comme tout le monde. Mais le boycott «révolutionnaire» menace. Il demande à Orson Welles, de passage sur la Croisette, d’intervenir :
«Parlez, maître ! Sinon Forman est foutu.»
Welles répond la phrase qui donne son titre au livre. Comme dit plus loin une anagramme,
«Rassam se ramasse.»