Un Nobel, vu côté jardin, c’est autant le bordel qu’un Goncourt. Sauf que l’émeute se déroule chez l’éditeur et pas chez Drouant. L’équipe de Gallimard, qui a l’expérience de l’un et plus encore de l’autre, sait bien que rien ne peut endiguer cette transe collective. Elle ne tentera donc rien d’inutile.
Alacrité. A 14 h 20, Antoine G. se pointe, plus rose encore que d'habitude, à l'entrée de la rue Gaston-G. Rentrant apparemment d'un déjeuner avec Jérôme Garcin, il nous confie que tout ça n'était pas prévu et que, de toute façon, il a, à 15 heures, un rendez-vous pris de longue date qu'il entend bien honorer. La presse audiovisuelle de la planète entière est donc priée de patienter dans le hall pendant deux heures, le service de presse formant un mince barrage féminin en haut des marches menant aux salons. Le barrage (les corps, mais non la vertu !) cède vers 16 heures. Illico, cadreurs et photographes installent Patrick Labiche, responsable des services généraux, derrière une table pour faire doublure lumière. Encore une demi-heure et le lauréat vient enfin s'asseoir à la table. Une pluie de questions éculées s'abat sur lui, auxquelles Modiano répond avec une alacrité qui lui est peu coutumière : le Nobel 2014 est sincèrement heureux. Il était en train de marcher dans la rue vers 13 h 15 quand il a appris la nouvelle. Qu'a-t-il fait alors ? «J'ai continué de marcher.» Mais pourquoi ? «Mais parce que c'était un peu… enfin je