Patrick Modiano plutôt que Philip Roth, ou Haruki Murakami. Les académiciens suédois qui attribuent le prix Nobel de littérature ne détestent pas étonner le monde. Mais si la surprise est de taille, elle est aussi excellente : quel écrivain peut se vanter de s'attirer une sympathie aussi constante, jamais démentie, et cela dans toutes sortes de publics, sans pour autant jouer dans la catégorie galvaudée des best-sellers ? C'est vrai pour la France, mais aussi pour les Etats-Unis. On aime imaginer un engouement d'envergure internationale : Patrick Modiano est traduit en 36 langues, comme J.M.G. Le Clézio, l'autre Français récemment couronné (en 2008, lui aussi un auteur Gallimard), mais les deux écrivains n'ont pas le même fan-club. Le lectorat de Modiano se caractérise par une discrète addiction, et cela dure depuis qu'il a commencé à publier, en 1968, à 23 ans (la Place de l'Etoile). Sa carrière est longue, prolifique, régulière, sans fracas - à l'exception du prix Goncourt en 1978 pour Rue des boutiques obscures - ni baisse de tonalité.
Les nobélisables possibles dont les noms circulaient le plus, ces derniers temps, sont deux auteurs dotés d’une aura politique, un genre très représenté dans le palmarès : le Kényan Ngugi Wa Thiong’o, qui écrit en kikuyu après avoir abandonné l’anglais, langue de la colonisation, et la Biélorusse Svetlana A