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entretien

Patrick Modiano : «Si on fait de la prose, c’est parce qu’on est mauvais poète»

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Patrick Modiano, prix Nobel de littérature 2014dossier
En 2007, Patrick Modiano évoquait pour «Libération» ses débuts dans la littérature.
Patrick Modiano, le 20 novembre 1978 à Paris. (Photo AFP)
publié le 9 octobre 2014 à 19h26

Dans un entretien accordé à Libération en 2007, à l'occasion de la publication de Dans le café de la jeunesse perdue, Patrick Modiano évoquait deux grandes figures littéraires qui ont accompagné ses débuts, Raymond Queneau et Paul Morand, et des textes qui ont marqué sa jeunesse.

Le premier écrivain que vous avez connu est Raymond Queneau. Plus tard, avec André Malraux, il a été témoin à votre mariage. Comment est-il entré dans votre vie ?

De 11 à 17 ans, j'ai été dans des pensionnats. Quand j'étais à Paris, je pouvais sortir le samedi et j'allais chez mes parents. Ma mère connaissait la femme de Queneau et un samedi, à déjeuner, il se trouvait là. J'avais quatorze ans et demi. Il a dû voir que j'étais un peu livré à moi-même. Par gentillesse sans doute, il m'a dit : «Tu peux venir déjeuner chez moi le samedi.» Donc, de fin 1959 à juin 1960, quand j'étais interne au lycée Henri IV, je suis allé déjeuner chez lui. Il était souvent seul, le samedi. Il habitait rive droite, près du pont de Neuilly, c'était une espèce de bloc d'immeubles 1930. Square Casimir-Pinel, c'est ça ! Un nom qui aurait pu figurer dans ses livres. Ensuite, il me raccompagnait en taxi, rive gauche, où il allait voir… une amie, place Saint-André-des-Arts.

Vous parliez de quoi ?

Comme il était obsédé par les mathématiques, il m'aidait à faire mes devoirs de ce qu'on appelait alors géométrie dans l'espace. Je n'y comprenais rien. Il essayait de m'expliquer. C'était un ou deux ans après Zazie dans le métro. Il me disait qu'il l'avait écrit à partir d'équations. C'était très obscur pour moi. Il me demandait mes lectures. Il avait été intrigué parce qu'elles ét