L’ouvrage, en premier lieu, surprend. Il met presque mal à l’aise. Building Stories, de Chris Ware, sorti il y a deux ans aux Etats-Unis et qui paraît en français, chez Delcourt, n’est pas une bande dessinée ordinaire. C’est une boîte lourde et volumineuse. A l’intérieur, quand on ose enfin l’ouvrir, se cachent 14 albums. Tous de formes différentes, ce sont des livres, des journaux, des posters, des panneaux. Au lecteur, ensuite, de se débrouiller, de lire dans le sens qu’il veut l’intégralité des 260 pages ou de seulement picorer.
L'ouvrage est un château Lego à concevoir sans plan, une expérience graphique presque physique. Building Stories est un jeu de mots, en anglais, entre le lieu où se déroulent la plupart des histoires, un immeuble de quelques étages de Chicago et le fait de devoir construire soi-même la narration. «Dans l'incorporalité électronique de l'existence, il est parfois rassurant - voire nécessaire - d'avoir quelque chose à quoi se raccrocher, commente Chris Ware en quatrième de couverture. Ainsi, l'acheteur trouvera dans cette boîte une variété parfaitement équilibrée d'ouvrages conçus pour répondre à pratiquement tous les goûts artistiques ou poétiques imaginables, de la causticité corrosive de la jeunesse au sérieux écœurant de la maturité.»
Chris Ware, 46 ans, s’il est multirécompensé et l’un des auteurs américains les plus importants des deux dernières décennies, est adoré des professionnels mais