Menu
Libération
chronique

Fusion nucléaire

Article réservé aux abonnés
Le cahier Livres de Libédossier
publié le 5 novembre 2014 à 17h06

Elisa nous écrit : «Je viens d'emménager avec Pierre dans un bel appartement tout blanc, mais j'hésite à mélanger mes livres avec ceux de mon nouvel amour. Ai-je raison ?» Eh bien chère Elisa, nous vous répondrons sans détour : oui et non.

Fusionner deux bibliothèques est un acte d’une intimité folle. Il faut bien y réfléchir, de préférence avant d’avoir déballé les cartons. Si Pierre n’a que trois livres, si c’est là tout le bagage dont ce garçon a jugé utile de s’encombrer pour cette aventure transocéanique qu’est une vie de couple, alors la fusion sera aisée mais les soirées à bord seront longues. Si, à l’inverse, votre bel amour tout neuf possède plus de 5 000 ouvrages, faites-lui rencontrer Louise, votre amie bibliothécaire, et souhaitez-leur bonne chance.

Dans tous les autres cas, il faudra évaluer la situation au regard de quelques critères simples. Exemple : Pierre débarque avec 500 bouquins qu'il a classés par ordre alphabétique, de Pierre Abélard (une merveilleuse édition de De l'unité et de la trinité divines) jusqu'à Stefan Zweig (le Monde d'hier : souvenirs d'un Européen). Ce classement révèle un esprit assez peu littéraire, voire obtus, quoique les œuvres encadrant cette bibliothèque ne soient pas sans intérêt. Dans le Zweig, Pierre a souligné à l'encre bleue cette phrase : «Maintenant que le grand orage l'a depuis longtemps fracassé, nous savons depuis longtemps que ce monde de la sécurité n'était qu'un château de nuées. Pourtant m