Il se revendiquait volontier soufi, ce courant mystique de l'islam qui chante l'amour de l'Unique et de Sa création. «Pour les islamistes, les soufis sont encore pire que les chrétiens car si pour ces derniers Dieu s'est incarné une fois, pour les soufis, il s'incarne en chaque être humain», expliquait Abdelwahab Meddeb, essayiste, romancier, traducteur et poète qui aimait à citer aussi bien Ibn Arabî, le poète du XIIIe siècle («Que ton cœur soit le temple qui accueille les croyances toutes»), que Rûmi, le poète et derviche du plateau anatolien d'origine perse avec son célèbre poème : «Viens à moi qui que tu sois musulman, juif, chrétien ou apostat.»
Dans l'une de ses dernières tribunes, publiée cette fois-là dans le Monde début septembre, l'écrivain clamait son indignation face aux égorgements d'otages par l'Etat islamique : «Comment laisser ces barbares fiers de leur crime, les laisser souiller le mot islam et agir en notre nom ?» Et il appelait encore une fois à revenir au soufisme «qui impose au sujet la complexité et l'affranchit pour une parole plus libre qui fait trembler le dogme». Son dernier livre s'intitulait Portrait du poète en soufi (aux éditions Belin).
Violence. Mort jeudi d'un cancer, cet intellectuel, né à Tunis en 1946 et qui animait depuis 1997 l'émission Culture d'islam sur France Culture, n'hésitait pas à être à contre-courant ni à assu