Dans son appréhension du monde, le héros d’
Yparkho,
un Crétois nommé Ilias, ne dispose pas de la palette sensorielle complète. L’odorat a de l’importance pour lui, citons
«l’éculée senteur des graisses»,
puisqu’il est mécanicien, et
«les fragrances saisonnières des premiers lys blancs».
Le goût compte aussi, certainement. Surtout la vue et le toucher sont primordiaux. Ilias est sourd et muet, comme sa mère Maria avec qui il vit. Il pêche, nettoie et cuit le poisson, elle met la table, partage des tâches, repas en commun vécus à des rythmes différents. Ilias donne les arêtes aux chats.
«Maria n’a pas fini de dépiauter, de mâchouiller longuement, par inertie sénile, atermoiement de peu d’appétit.»
Moteur. A part le coup de peinture pour la bande tricolore qui enjolive l'embarcation d'Ilias, rien ne reste blanc longtemps. L'ocre est ogre. La maison est accrochée dans un virage, sur «la route de cendre rousse qui mène au bourg», à deux kilomètres. De lourds camions, des autocars, des bétaillères, parviennent à se traîner jusqu'à Ilias, qui ausculte, démonte. Il peut sentir un moteur ronronner à défaut de l'entendre. De même qu'il parvient à établir des catégories entre les différentes agonies animales : «Il y a quelque chose avec les poissons, Ilias sait qu'un mulot, un rat, un chat ou le moindre des oiselets s'absout et se défend encore par le son, piaule une ultime phonie inaudible à ses tympans al