Des poupées russes qui ne s'emboîtent pas (et qui ne sont donc pas des poupées russes), telle est une manière d'appréhender l'œuvre autobiographique de Michel Leiris, né en 1901 et mort en 1990. La Pléiade a publié il y a onze ans la Règle du jeu dont les quatre volumes, Biffures, Fourbis, Fibrilles et Frêle Bruit sont originellement parus entre 1948 et 1976. Ce volume-ci remonte le temps en proposant, outre l'Afrique fantôme (journal ethnographique de la mission Dakar-Djibouti 1931-1933) et Miroir de la tauromachie, l'Age d'homme (première parution en 1939, la fameuse préface «De la littérature considérée comme une tauromachie» n'arrivant qu'en 1946) et un bref texte inédit de 1930, Lucrèce, Judith et Holopherne. Il a été commandé à Michel Leiris d'abord réticent par son ami Georges Bataille pour un Almanach érotique qui ne sera jamais publié. Et y apparaissent donc les deux figures féminines qui seront au cœur de l'Age d'homme, avec leur cortège de masochisme et de sadisme. Violée par Sextus Tarquin, Lucrèce raconta le lendemain l'outrage à son père et son mari «et se tua d'un coup de poignard sous leurs yeux», selon le «Dictionnaire Larousse» que cite Leiris. Quant à l'héroïne juive Judith, toujours selon la même source, elle s'introduit auprès du général ennemi et «le captive par sa beauté», après quoi «elle lui tranche la tête» qu'elle rapporte a
chronique
Michel Leiris d’un nouvel œil
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par Mathieu Lindon
publié le 17 décembre 2014 à 17h06
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