Dans le bureau de Patrick Modiano, qui habite près du jardin du Luxembourg un vieil appartement aux plafonds très hauts, les livres s'alignent jusque sur le canapé rouge. Il dit qu'il a dû se débarrasser récemment de trois mille ouvrages. Il a conservé de son adolescence quelques livres de poche - à l'époque, c'étaient les premiers - dont il aime redécouvrir les passages qu'il soulignait. Il se souvient des couvertures très colorées, kitsch et un peu agressives des classiques, Stendhal, Balzac. Il peut encore décrire celle de l'édition française de l'Amant de lady Chatterley. Lui-même était à ce moment-là en Angleterre, où le roman de D.H. Lawrence était interdit.
Il a également conservé quelques livres de son enfance. A 8 ans, il aimait le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède. Il s'est souvenu de Selma Lagerlöf et d'autres auteurs suédois, comme Hjalmar Söderberg, quand il est allé à Stockholm recevoir le prix Nobel de littérature. Nous l'avons rencontré au lendemain de son retour. Il ne semblait pas le moins du monde fatigué, ni assommé, par ce qui venait de lui arriver.
Quel a été le moment le plus difficile à Stockholm ? Le discours ?
Quand on est sur une estrade, on est seul, ce n’est pas tellement difficile. Le problème, c’est quand on est avec beaucoup de personnes dans une pièce et qu’on ne peut pas parler à tout le monde, ce genre d’assemblée. Quand on doit faire un discours, on est obligé, il faut se lancer, c’est comme quand on saute en parachute, il ne faut pas hésiter. Il n’y a pas eu de mome