Les mémoires de David Lodge se lisent comme un roman, selon l’expression consacrée. Mais un roman de qui ? On ne dirait pas un roman de David Lodge, écrivain caustique né en 1935, qui a séduit les lecteurs français à partir de la fin des années 80 grâce aux éditions Rivages, avec des comédies de mœurs endiablées, telles que Jeu de société ou Un tout petit monde, aux constructions plus complexes qu’il n’y paraissait alors. Né au bon moment, rédigé de manière linéaire, et benoîtement, couvre les années qui vont de 1935 à 1975, date à laquelle paraît Changement de décor, un tournant dans la carrière de Lodge.
Il ne parle que le latin
L’auteur a 4 ans quand la guerre commence, un peu plus de 10 quand elle se termine. Les événements sont pain bénit, il se montrera souvent soucieux de vivre des expériences nouvelles - fussent-elles limitées ensuite au service militaire et à quelques voyages -, tout au long de ses souvenirs. «Une expérience intéressante, c’est de l’argent en banque pour un romancier et il n’est jamais trop tôt pour ouvrir un compte», écrit Lodge, homme économe par atavisme et par nécessité, qui allait porter ses manuscrits plutôt que de les mettre à la poste. Comme tous les petits Londoniens, il a été évacué à cause des bombardements, n’a cessé de faire des allers et retours entre la banlieue où ses parents ont une petite maison et la campagne. Il est mis en pension brièvement, ne le supporte pas et en fait l’origine des épisodes dépressifs qui le terrasse