Ne nous voilons pas la face, Marc Levy vient de sortir son livre annuel, avec farandole de bons sentiments, d'amours mordorés (moi aussi je peux écrire n'importe quoi), de feelgooditude assumée, d'ailleurs, selon une consœur qui a eu la chance de le rencontrer, il est encore plus gentil que ses livres. Rappel des chiffres, et il y en a pas mal dans Une fille comme elle, l'auteur de le Premier Jour, la Première Nuit, Où es-tu et tout ça, a vendu plus de 42 millions d'exemplaires depuis 2000 et le succès mondial de Et si c'était vrai (adapté au cinéma, américain s'il te plaît, par Dreamworks), bref on connaît l'histoire, à moins d'habiter une grotte. Le cousin de Julie Andrieu reste modeste, qui déclare, sur une espèce de FAQ destinée à ses lecteurs qui lui posent des questions et auxquelles il répond perso, « rien n'est jamais acquis. A chaque nouveau livre, je me remets en question. Croyez-moi, je ne sais jamais à l'avance, avant la parution de chaque livre, si ceux-ci vont rencontrer leur public ». Enfin là-dessus, il n'y a plus guère de doute après 18 romans à vertigineux succès. « Je me considère comme très chanceux, touché et honoré d'être lu dans autant de pays, je remercie mes lecteurs de leur générosité et de leur fidélité mais je reste lucide sur le fait que …» OK, Marc on va s'y mettre, là.
Tiens, un ascenseur ?
On frôle même le docu sur la vie de liftier, le maître et son instrument très ancien étant au cœur d'un immeuble new-yorkais (on va y revenir). Le liftier aura parcouru 594 km par an, soit 22 572 depuis le début de sa carrière, bientôt 23 448 km, la hauteur du Nanda Devi, la déesse de la joie (il est indien, comme son neveu qui va bientôt arriver), qu'il vise de remonter je ne sais plus combien de fois. Cet ascenseur est une antiquité, il n'y en a plus que 53 dans tout New York, il commence à 6 h 15 par la porte de service puis finit à 18 h 15, prend le métro à Washington Square, vide jusqu'à la 34e rue où il cède sa place à une dame, puis à la 42e il lit son journal jusqu'à la 116e rue, puis 700 mètres jusque son domicile où il dîne avec sa femme depuis trente-neuf ans (il y a eu drame). Beaucoup de chiffres et de précisions on l'a dit, et des phrases que tu montes «au ciel dans le cercueil d'un roi» grâce à la fresque Renaissance au plafond, etc.
Et donc New York ?
Oui, l'auteur y vit, et voilà pourquoi : «Vivre au contact de personnes qui n'ont pas la même culture, la même langue que vous est toujours très enrichissant. Et puis c'est une école d'humilité quotidienne : rien n'est jamais acquis, il faut tous les jours oublier ses habitudes, ses réflexes et s'adapter aux us et coutumes du pays dans lequel on vit ; même si certaines n'ont parfois aucun sens pour vous… » On a vérifié, l'immeuble du 12, 5e avenue, existe bien, tel que décrit dans le roman, il y a un resto français à côté (Chez Claudette) comme le resto de l'héroïne en chaise roulante et de son papa, et pour info il y a aussi beaucoup de restos italiens.
Et sinon ?
Eh bien il y a l’Inde qui est présente, rapport aux personnages principaux, le handicap aussi, rapport à Chloé dont on ne va pas spoiler l’histoire, non, non, non, mais dont on peut quand même dire qu’elle semble bien être la voix-off (en italiques entre deux chapitres, et une femme à part entière et c’est la seule chose qui compte). Et puis des petits dessins aussi, de la chaise roulante, de la station Washington Square. Que du bonheur, on te dit.