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Interview

Pierric Bailly : «Le narrateur peut être épuisé d’être père ou de ne pas l’être»

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Entretien avec Pierric Bailly
A Paris, le 21 janvier. (Photo Jérôme Bonnet pour Libération)
publié le 7 février 2020 à 17h26

Pierric Bailly est un romancier d'aujourd'hui. De par son âge, d'abord. Il est né en 1982. Surtout, aujourd'hui est son sujet. Le narrateur des Enfants des autres a installé le chauffage et posé lui-même le parquet du pavillon où il habite avec sa femme et leurs trois garçons. Elle travaille à l'office du tourisme, il est dans le bâtiment. Il fait des chantiers. Il est le genre de père à «fabriquer mille trucs» avec ses enfants. Ils ne manquent de rien, ainsi qu'on le dit pour un milieu où il s'en faudrait de peu pour que le manque survienne. Ils sont jeunes encore. Les personnages de Bailly vieillissent en même temps que lui.

Dans Polichinelle, son premier roman (P.O.L, 2008), un étudiant de 20 ans traîne avec des gens de 15, les amis de sa petite sœur. Le monologue est travaillé jusqu'à paraître restituer un bloc de réalité brute, les conversations et les situations (il ne se passe rien d'autre que la jeunesse) sonnent si juste que le lecteur se sent comme un espion en embuscade. Même sensation avec Michael Jackson (2013), dont le narrateur, qui a toujours cinq ans de plus que sa sœur, affronte l'épreuve du feu, du désir, du sexe, par étapes, entre 18 et 26 ans.

On est très loin de Paris. Le Jura, la nature aussi bien que les supermarchés, reste le territoire de Pierric Bailly et de ses personnages. Un fossé se creuse quand les narrateurs vont à l'université à Besançon. Lui-même est allé à Montpellier étudier le cinéma, présent à l'état de