J’ai lu ce livre,
Metro 2033
, roman fantastique post-apocalyptique russe de 850 pages, écrit par Dmitry Glukhovsky, que je découvrais par la même occasion. Le genre de pavé franchement parfait pour l’été a priori. Avec des dizaines de personnages, qui se croisent, qui causent (beaucoup, c’est plutôt bavard) et qui combattent ensemble (versus des mutants, des néonazis, des sectes, des cannibales, des monstres divers et variés et la magie sombre des tunnels) pour tâcher de survivre dans ce vaste métro moscovite où se confine à peu près tout ce qu’il reste de l’humanité. Et des tas de rats aussi. Prometteur dans le genre dystopique.
Mais au bout de 200 pages, je tique. Au bout de 500, jhallucine. Après 800, je suis atterré. Encore une fois, il y a donc des dizaines et des dizaines de personnages, qui se rencontrent, échangent, collaborent ou s’affrontent, station après station, chaque tunnel offrant son lot de dangers bizarres. Et dans cette longue rame pleine à ras bord de personnages de tout poil : pas-une-seule-femme. Pas un seul personnage féminin ne serait-ce que vaguement secondaire dans un bouquin de plus de 800 pages. Seules mentions faites des femmes, je les ai retenues, c’était facile, il y en a cinq : des femmes de ménage (à deux reprises), des femmes qui font la cuisine pour leur famille (à deux reprises, peut-être trois, j’ai un doute), une femme prête à vendre son enfant contre quelques douilles (la monnaie d’échange dans le métro des survivants). Le tout tenant à chaque fois sur quelques lignes.
Juste totalement invisibles
Bref, 850 pages sans femmes, sinon dans des rôles d'arrière-arrière-plan débiles ou caricaturaux. Et cela sans aucun motif romanesque : les femmes sont là, elles n'ont pas toutes disparu à cause des radiations, elles n'ont pas été capturées par les mutants, les cannibales ou les membres de la station sataniste ; elles sont juste totalement invisibles. Elles font le ménage et la popote pendant que les bonshommes s'occupent des choses sérieuses (survivre, organiser la société du métro, vaincre les mutants, etc.). Qu'avait donc l'auteur dans la tête en écrivant ce bon gros pavé, d'ailleurs réussi (la chute est plutôt remarquable), pour ne pas se dire une seule fois qu'impliquer des personnages féminins intéressants serait éventuellement une bonne idée, et qu'un roman qui entend inventer une société complexe de survivants peut difficilement ignorer la moitié de l'humanité ? Qu'avait donc son éditeur dans la tête pour ne pas le lui signaler fortement ? Franchement, les meufs vénères ont tellement raison d'être vénères.
PS : livre initialement écrit en 2002, OK, mais ce n'est pas préhistorique. Vu le succès du titre (près de 400 000 exemplaires vendus en Russie, traduction dans plus de vingt langues), il y a eu deux suites, Métro 2034 et Métro 2035, respectivement parues en 2009 et 2015. On peut simplement espérer que l'auteur en aura profité pour rectifier un minimum le tir. On peut aussi se dire que ce ne serait plus possible aujourd'hui, en 2020, que ça ne passerait plus. N'est-ce pas ?