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Libération

Un journaliste, officier à Vladivostok, jugé pour espionnage. Trop bavard pour la grande muette russe. Gregori Pasko avait révélé au public des périls nucléaires.

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publié le 21 janvier 1999 à 23h15

Vladivostok envoyé spécial

Sur fond rose bonbon, dans son habit de capitaine de frégate, le journaliste Gregori Pasko martèle ses mots face à la caméra: «J'ai vu comment l'on stockait ici (à Vladivostok, Extrême-Orient russe, ndlr) les déchets nucléaires liquides, comment on les a versés au large de nos côtes" J'en conclus qu'après trente ans de non-décision, on risque ici un autre Tchernobyl.»Il ajoute: «Pourquoi les Japonais s'inquiètent-ils de nous voir jeter des déchets nucléaires à la mer et pourquoi les Russes restent-ils indifférents? Se soucie-t-on si peu de notre vie? Quelle Terre va-t-on laisser à nos enfants?» Suivent les images de ce reportage titré la Zone du danger extrême: un navire semblable à un pétrolier d'où un gros tuyau déverse des déchets nucléaires liquides à même la mer du Japon. Diffusé sur la chaîne nippone NHK, ce reportage a fait l'effet d'une bombe.

Sur écoute. Quelques jours plus tard, le 13 novembre 1993, il est diffusé lors d'une émission écologique sur une chaîne russe. Le FSB (ex-KGB) accuse alors Pasko, journaliste à Boevaïa Vakhta («Mission de combat»), journal de la Flotte russe du Pacifique, de «trahison». L'affaire tourne court quand le FSB se rend compte que le reportage a été autorisé par les supérieurs militaires de Pasko. Mais les services secrets surveillent alors le journaliste, le mettent sur écoute. En novembre 1997, Pasko part au Japon, avec un billet payé par la mairie de Vladivostok, pour enquêter sur les cimetières de soldats